«  Mon rêve est réel  », nous dit Clémence Preiss, et on veut y croire aussi. C’est celui d’une fille qui expose son ambition, assume ses revendications et vit dans l’extrême positivité, bien qu’avec la dérision nécessaire. On nous a appris à se limiter, à rester discret, mais elle n’a peur de rien. Clémence Preiss a la vingtaine, mais «  l’âge n’a pas d’importance  ». Née en France mais d’origines très variées, elle n’a «  pas besoin de racine  », et se sent chez elle à Miami comme à Londres. Elle «  n’aime pas les choses basiques, ou vides de sens  », et se revendique pure. Elle lit De l’âme d’Aristote un samedi après midi dans un resto bio et végétarien du 3ème, mais aime aussi la vodka citron, et le luxe – du moins quand il est artisanal. Elle nous vient tout simplement du «  paradis sur Terre  », Cahors, où elle s’est définitivement connectée à la nature tout en éprouvant, seule dans sa chambre d’adolescente, ses premiers émois sonores sur du rock comme sur de la grosse makina espagnole. Après avoir tout de même appris son solfège, elle atterrit à Paris, et se livre autant au milieu de l’électro style Institubes qu’aux enseignements de la pianiste Virginie Fontanarosa. 

Depuis, Clemence Preiss se dit que tout est possible. Être thérapeute corporelle, magnétiseuse, voire coach, n’empêche pas d’être businesswoman, et encore moins de poser ses obsessions musicales sur un premier EP. À peine lui a-t-on montré les rudiments de la production qu’elle a rapidement mis au monde trois titres exubérants qui ne se refusent ni excès, ni cliché, ni «  pose de lover  ». L’électro-pop épique et breakée de «  Dream  », les messages de bienveillance et de rédemption perdus dans l’écho d’  «  Erasia  » (qu’elle a plié en 6 heures), ou la soul grandiloquente et dancefloor d’ «  Exit  » communiquent la mystique d’une fille nourrie à la deep house et au gros son hiphop comme à Chopin et à Portishead. Son inspiration et ses intentions en restent néanmoins très personnelles, et elle vise rien moins qu’une position de producteur touche-à-tout la Timbaland – autant ne pas se priver. Vocaux opulents, claviers transe, rythmes épais, celle qui dit «  guérir les gens par prise de conscience émotionnelle  » pratique sur disque un traitement de choc. 

À lui seul, le titre du LP de Clémence prévu pour 2015 sonne comme un petit traité ésotérique : Soul And Substance. Pas analytique pour autant, toujours dans le ressenti et l’instinct, elle avoue elle-même parfois se «  rendre folle  », mais uniquement de bonheur… Elle affirme d’ailleurs que tout le monde «  ne peut se faire que du bien  ». Dans ce cas, autant adhérer dès maintenant à sa philosophie pour tenter sa chance.